lundi 27 octobre 2014

Stage d'orthopédie, Acte I

Quand j’ai rencontré l’urologue, nos conversations m’ont rapidement confrontée à une évidence : mes connaissances en anatomie étaient absolument lamentables. En vérité, pour décrire la machine humaine, je ne disposais presque que de la comptine anglaise de mes 5 ans :

Head,
Shoulders,
Knees and toes,
Knees and toes.

RIP mes cours de bio du lycée, mon homme prononçait « uretère », moi j’entendais « urètre » et je ne savais de toute façon placer ni l’un ni l’autre. Idem pour les reins que, dans mon esprit, j’avais agencés de manière tout à fait inédite. 

Du coup, quand il intégra un service d’orthopédie dans le cadre de son parcours de chirurgie générale, je me dis que là, je saurais être au niveau.

Le bras, j'ai. Pareil pour le pied, c’est acquis. Le genou, c’est dans la comptine donc c’est bon aussi.

Après 2 ou 3 recherches Google, je me sentis même prête à prononcer - non sans une certaine hardiesse - les mots « phalange » et « trapézoïde ».


Nos conversations à propos du boulot se trouvèrent considérablement simplifiées par ce stage qui me permit par ailleurs de suivre les nouveaux épisodes de la série « Je suis humain et mon corps est mon jouet ».

Dans le rôle du boxeur en culottes courtes, cet adolescent qui, un jour qu’il était en rogne, avait décidé d’écraser son poing contre un mur. Or au combat mur porteur vs métacarpe, peu de suspense : c’est le béton qui gagne. Quelques temps après cette colère dont la violente manifestation aurait raidi le collant de n’importe quel yogi, le petit rageux revenait en consultation, sans son plâtre mais pas sans aplomb.

- Bah il est où votre plâtre ?
- Il m’a saoulé.
- …

À un moment, les médecins ont leurs limites et on n’arrivera jamais à faire gravir l’Everest à quelqu'un souhaitant à tout prix devenir cul-de-jatte.

Entre deux anecdotes de cet acabit surgit cet autre jeune type qui avait passé un après-midi à arpenter les rues de sa ville en roue arrière sur sa moto. Passe-temps intellectuel qui, après une glissade mal négociée, avait fini par lui coûter deux orteils. Bye bye le secondus et le tertius* ! Et le pauvre jeune homme d’origine tunisienne de s’émouvoir lorsqu’il réalisa que l’été d'après au bled, il ne pourrait plus mettre de tongs.

Cette réaction, personne ne l’avait vue venir. Moi, ce que je n’avais prévu non plus, c’est qu’à force d’utiliser de nouveaux ustensiles pour rafistoler les gens, mon interne se prendrait de passion pour les outillages en tout genre et qu’au vocabulaire médical, il me faudrait désormais ajouter celui de Mr. Bricolage. 

(Une suite viendra, un jour, dans Stage d’orthopédie, Acte II).


* L’index et le majeur des pieds, merci Google (encore).


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