jeudi 27 novembre 2014

Croissant ou cadavre ? À chacun son samedi matin.

Le samedi des amoureux, c’est le jour de la grasse matinée, des croissants et du brunch. C’est le jour où l’on flâne dans les rues sans but précis, où l’on s’assoit en terrasse à midi pour boire une bière. Enfin ça, c’est vrai pour ceux qui ne sont plus étudiants, moi par exemple.

De son côté, l’interne a beau travailler à l’hôpital toute la semaine, plus encore que le type en fusion-acquisition dont on plaint les horaires, et avoir des responsabilités non négligeables ie la vie, il reste un étudiant. Il a donc parfois cours le samedi. Ô joie.

C’est ainsi qu’un samedi vers 7h45, mon interne se lève et se prépare à m'abandonner au profit d'un cours de dissection. Malgré cette désertion, l’ancienne élève que je suis savoure le moment, car il y a quelque chose de diaboliquement délicieux à profiter de ce dont les autres sont privés. On déteste être malade, calé dans le canapé à regarder des DVD l’après-midi d'un jour férié. On veut l’être quand tout le monde bosse, on est d'accord ? Là, c'est pareil. 

Niark niark niark, qui est-ce qui va profiter encore de la couette, regarder un épisode de House of Cards, lire la dernière B.D de Riad Sattouf ? C’est bibiiiii ! Je promets à mon pyjama de ne pas le quitter avant midi. Je jure fidélité à mon lit et maudis seulement les boulangers de ne pas disposer d’un service de livraison à domicile.

Mais j’ai du savoir-vivre et je sais qu’il est cruel d’extérioriser ce genre de considérations. Ce matin-là, je fais donc appel à toute ma bienveillance puis fais mine de m’intéresser malgré des paupières alourdies par les Margaritas de la veille (oui, les Margaritas sont un fil conducteur), et c’est donc forte de bons sentiments que j’évoque la scène du film E.T., celle où le jeune Elliot, dans un élan humanitaire ambiance Brigitte Bardot, ouvre les bocaux de son cours de biologie et libère tout un tas de grenouilles promises à la mort par chloroforme.

- Je ne vais pas disséquer une grenouille.
- Une souris, alors ?
- Un cadavre.
- !
- ?
- !!!?!

jeudi 20 novembre 2014

Soirée débrief entre internes : paie ton cauchemar

À la question : « Ce serait quoi ton pire cauchemar ? », je répondais assez spontanément : « Me retrouver seule au milieu de l’océan, la nuit ». Je trouvais l’idée absolument terrifiante. Avant, j’étais épouvantée par l’idée d’une séance de natation nocturne. Mais ça, c’était avant. Depuis, je suis partie en vacances avec deux urologues et une gynéco.

Au début, je faisais la maligne, je partais avec trois médecins, je disais à mes potes : « Alors là, je ne risque vraiment rien, il peut tout m’arriver ahahaha ! » Ouais, c’est ça, rigole fillette.

On est au Maroc, il fait beau, il y a du poisson grillé et des copains, tout est parfait. Après une journée passée entre la plage et des tajines, nous voilà de nouveau réunis autour d’une table, parce que manger est une activité en soi au Maroc. Le serveur dépose devant nous un couscous, quelques bouteilles de Boulaouane nous aident à faire passer la semoule. Au départ, c’est une soirée comme une autre, on se raconte des trucs, on rigole.

Sauf que les 3 médecins se connaissent depuis près de dix ans, qu’ils officient dans des hôpitaux différents et que ça fait longtemps qu’ils ne se sont pas vus. Du coup, ils ont plein de choses à se raconter. Moult moult choses. Déjà, je comprends que la soirée m’échappe. Je le réalise d’autant mieux à la découverte de l’expression « histoires de chasse », soit les situations professionnelles qui ne se sont pas passées comme prévu. Or les histoires de chasse de médecins sont légèrement différentes de celles de ton pote en marketing. Tout le monde s’en remet de ses histoires à lui. 

jeudi 13 novembre 2014

Bref, mon mec a des photos de cul dans son téléphone

Un soir, on était dans un bar.
Devant une Margarita, il m’a dit : « Tu veux que je te montre des photos prises au bloc ? »
J’ai entendu : « Tu veux voir des photos trop gores qui vont te faire flipper ? »
J’aime bien avoir peur. J'ai dit oui.
Il a pris son Smartphone, il a ouvert ses photos, les a fait défiler, j’ai compris qu’il les sélectionnait pour voir jusqu’où je tiendrai.
Il s’est arrêté sur une photo de lui en tenue de bloc, il l’a trouvée classe. 
J’ai dit que je préférais les uniformes de pilotes, il s’est vexé, il a regardé quelles photos me feraient regretter mes paroles.
J’ai aperçu la photo d’une infirmière hyper jolie.
J’ai dit : « Elle est hyper jolie ».
Il m’a dit : « C’est vrai ».
J’ai pris un air tranquille. J’ai demandé son prénom. Je me suis dit que j’irai checker son profil Facebook.
Il m'a montré une photo d’équipe au-dessus d’un ventre ouvert. On aurait dit qu’ils étaient en pyjama. Il m’a dit : « Là, c’est moi ». Il avait une charlotte sur la tête, un masque sur le visage et des crocs aux pieds. J’ai repensé aux pilotes, j’ai pas insisté.
Il a poursuivi avec la photo d’un pénis.
J’ai rien vu d’horrible.
Il a pointé la tumeur dessous.
J’ai vu un truc horrible.
Il m’a dit : « J’enchaîne ? »
J’ai répondu : « Il y a pire ? »
Il a désigné un autre pénis, noir comme une chipolata brulée au barbecue.
Il a dit que c’était à cause d’un cock ring resté trop longtemps et qu’on avait dû lui couper. J’ai pas voulu comprendre.
Il a dit : « Il n’a plus de zizi. »
J’ai compris.
Je lui ai dit : « T’en as pas des plus marrantes ? »
Il a entendu : « T’en as pas des plus effrayantes ? ».
J’ai vu un cul avec une boule de pétanque sanguinolente à côté. Ça m'a fait penser à ma copine qui dit toujours « Du cul, du cul, du cul ! » quand on parle d'amour. J'ai rigolé. 
Il a dit qu’il l’avait retirée des fesses du monsieur. J'ai moins rigolé. 
J’ai repensé aux parties de pétanque qu’on fait dans le sud l’été. J’ai repensé au pastis. Je me suis promis de ne plus jamais jouer mais de continuer le pastis.
Il y avait la même photo avec une courgette. J’ai pensé au gratin de ma mère. J’ai vu mon père en manger. J’ai effacé la photo de ma mémoire.
À la table d’à côté, il y avait un enfant qui jouait avec le portable de ses parents.
J’ai imaginé qu’il était notre enfant. Il n’était pas très beau alors je lui ai inventé une autre tête.
Je l’ai imaginé dire devant tout le monde : « Papa, pourquoi t’as des photos de zizis dans ton portable ? ».
Je l’ai imaginé dire devant la maîtresse : « Mon papa travaille sur des zizis. »
Je me suis dit que quand on aurait des enfants, je lui offrirai un Nokia 3210.

Bref, mon mec a des photos de cul dans son téléphone.

mardi 4 novembre 2014

Infirmières sexy vs George et Robert

Les discussions de copains et de comptoir me l’ont appris : la compétition est néfaste pour le couple. Se sentir moins brillant ou moins doué que l’autre fait naître un sentiment de dévalorisation qui finit par gangréner l’union. Les psys des magazines féminins et ma mère sont formels : on peut être complémentaires, mais à la condition de se porter mutuellement une forme d’admiration. Merci Cosmo, merci Elle, je veux bien, mais quand on sort avec un médecin, il faut tout de même s’accrocher un peu pour équilibrer l’admiration.  

On ne va pas se mentir, le travail est un élément qui participe de la fougue amoureuse. Il n’est pas le seul, ok, mais il compte pas mal. Le travail, c’est l’autre se réalisant, s’épanouissant en dehors de la sphère du couple, c’est franchement séduisant. Alors forcément, lorsqu’on vit avec un homme dont le job consiste à réparer des corps tandis que, pendant ce temps, on a élevé la procrastination au niveau de super pouvoir, on est autorisé à s’interroger sur son sort.

George Sand a un jour écrit « Il n’y a pas d’amour sans jalousie. » Elle est mignonne Georgette mais si j’étais jalouse, moi, je serais en perdition parce que dans un match m’opposant à l’hôpital, me font face en même temps sur le ring des co-internes jeunes et brillantes et des infirmières qui portent sous leur blouse un imaginaire classé X. Bonjour le déséquilibre.