jeudi 4 juin 2015

Médecin à la maison : vrai ou faux bon plan ?

Quand j’ai commencé à sortir avec un médecin, la partie pragmatique de mon cerveau a eu cette élégante fulgurance : « Ah mais vas-y comment ça va être utile ! » Et c’est vrai que ça l’est. Depuis plusieurs années, plus besoin d’aller chez le médecin généraliste. A la place, j’ai droit à un diagnostic maison. Pratique.

Enfin pratique a priori. Parce que si je profite d’un diagnostic attentif et personnalisé sans avoir attendu 25 minutes dans une salle d’attente bondée d’enfants qui chouinent et de vieux qui râlent, l’aboutissement de la consultation aka le processus d’obtention d’une ordonnance est en revanche beaucoup plus complexe. Non parce que détrompez-vous, quand je suis malade, mon médecin chéri ne dit jamais : « Ah mon pauvre petit chat, tu as de la fièvre, je vais te prescrire un truc qui va te remettre sur pied. » Non.

Mon mec en a vu d’autres et n’est pas impressionné par grand chose. En l’occurrence, je pourrais avoir un couteau planté dans le ventre, le mec dirait sans doute « Ok, donc là, faut quand même aller voir les collègues » mais il ne s’évanouirait pas, ne paniquerait pas non plus. Mon mec n’est pas ma mère en somme. Du coup, lorsque je tombe malade et que j’ai l’impression d’être au bout de ma vie, il compatit un peu pour être gentil mais s’en fout clairement. Face à mes « Je te jure je suis teeeeeellement mal, là », j’obtiens plutôt du « T’as rien. Prends un doliprane et arrête de gémir s’il te plaît c’est vraiment relou. » Damn, j’avais pourtant mis du Adjani dans ce « teeeeeellement ».

C’est ainsi qu’à l’arrivée du printemps, j’ai trainé une sorte d’angine pendant près de 3 semaines. Au programme : un mal de gorge d’une injustice totale parce que cela faisait déjà 3 mois que j’avais arrêté de fumer et qu’auparavant je n’avais jamais la gorge enflée, un rhume carabiné avec narines bouchées H24 assorties d’une évidente impossibilité de dormir et, pour le fun j’imagine, un mal de tête chronique qui a fait de la moindre petite contrariété un véritable sacerdoce.

Lému, ma pote qui habite très loin et que je skype souvent a fini par constater que je parlais du nez depuis plus de deux semaines. Elle m’a alors encouragée à aller voir un « vrai médecin » parce que, je cite, « Meuf, il est manifeste que ton mec n’en est pas un. » Stoïque, ce dernier a balayé d’un revers de main cet argument en même temps que ma supplication pour un antibiotique. « Les antibiotiques, c’est pas automatique ! ». Fils de pub. A force de dire ça, on n’en prend plus jamais, c’est débile.

Alors j’ai fait un truc que les médecins détestent, c’est-à-dire fi de son expertise pour me rendre à la pharmacie. Là, j’ai trouvé un jeune homme, également en blouse blanche, mais qui – enfin ! - comprenait mon désarroi. Sans doute aussi qu’il avait remarqué les commissures de mes narines, irritées et rougies par l’utilisation répétée de mouchoirs en papier (et de Sopalin après écoulement du stock de mouchoirs), mes yeux fatigués et mon teint blafard. Bref, il a vu que la bombe en moi dépérissait et a accepté de voler à son secours. Dix minutes plus tard, j’étais ressortie de la pharmacie avec un sac plein de comprimés qui devaient, le pharmacien me l’avait assuré, me tirer d’affaire. Sur une insistance de sa part que je ne me suis pas vraiment expliqué, j’avais également acheté du shampoing sec.

Remontant quatre à quatre les marches de mon escalier, je suis entrée chez nous avec un regard de défi et ai brandi le petit sac en plastique. A la vue dudit sac, le médecin a soupiré : « Fais donc voir si ça va t’être utile à quelque chose. » Et il a fait un truc qui est juste hyper énervant : il a détaillé à haute voix les molécules des différents médicaments. Donc déjà à ce moment-là, il me perd. Si ça se trouve, il bluffe total en plus : « De la clamaxitanine ? Bas voyons, et pourquoi pas du teroxefor ? ». Blablabla. J’ai cessé de l’écouter pour laisser mon cerveau fabriquer des images d’Homer Simpson dansant la samba. J’ai repris conscience lorsque l’une de ses phrases m’a semblé plus intelligible : « Ah mais quel tocard, tu ne DOIS PAS mélanger ces deux molécules sans quoi ton foie peut… ». Hop, il m’a reperdue. Je ne me rappelle donc plus de la suite exacte mais en gros, cela donnait quelque chose comme « ton foie peut se mettre à dévorer tes intestins tandis que du sang va soudainement jaillir de tes oreilles et que tu perdras la capacité à prononcer les consonnes. » Ou autre chose dans le genre à la sauce Game of Thrones. Bref, un truc flippant qui m’a donné moyennement envie de suivre les conseils du pharmacien.

Il est têtu, mais moi aussi. Je suis donc passée à l’étape supérieure de mon plan et me suis mise à devenir super relou. Mais alors vraiment super relou. J’ai râlé, gémi, éternué, reniflé plus que de raison et là, alléluia lumière divine et tutti quanti, cette odieuse technique a fini par porter ses fruits. Le mec s’est levé, s’est rendu avec flegme jusque dans la salle de bain, a saisi sa trousse de toilette dont il a sorti une petite boite blanche. De celle-ci il a tiré une vingtaine de cachets qu’il a posés sur la table basse du salon devant laquelle je me trouvais assise et m’a dit : « Tu prends un comprimé matin, midi et soir pendant une semaine. C’est tout. » C’est tout ? Mais putain le truc était là et t’as rien dit ? « Non parce que tu n’as rien. ». Ah ouais ? Eternuement direct et sans main devant la bouche vers son doux visage. J’ai pris les cachets comme il fallait pendant 3 jours, de façon aléatoire pendant 2 autres puis je les ai complètement oubliés et les beaux jours ont fini par faire passer la maladie.

C’est marrant quand même parce qu’hier, alors que je nous servais des bières pour l’apéro, quand j’ai dit que je n’avais plus de pilule mais qu’après tout, oh on s’en moquait, je n’ai pas eu le temps d’aller plus loin que mon chéri me tendait le décapsuleur en même temps qu’une ordonnance.

***

PS : Merci pour vos messages qui m'encouragent à écrire plus régulièrement. Promis, je m'organise ! 

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