Quand
j’ai commencé à sortir avec un médecin, la partie pragmatique de mon cerveau a
eu cette élégante fulgurance : « Ah
mais vas-y comment ça va être utile ! » Et c’est vrai que ça
l’est. Depuis plusieurs années, plus besoin d’aller chez le médecin généraliste.
A la place, j’ai droit à un diagnostic maison. Pratique.
Enfin
pratique a priori. Parce que si je profite d’un diagnostic attentif et
personnalisé sans avoir attendu 25 minutes dans une salle d’attente bondée
d’enfants qui chouinent et de vieux qui râlent, l’aboutissement de la
consultation aka le processus d’obtention
d’une ordonnance est en revanche beaucoup plus complexe. Non parce que
détrompez-vous, quand je suis malade, mon médecin chéri ne dit jamais :
« Ah mon pauvre petit chat, tu as de
la fièvre, je vais te prescrire un truc qui va te remettre sur pied. »
Non.
Mon mec
en a vu d’autres et n’est pas impressionné par grand chose. En l’occurrence, je
pourrais avoir un couteau planté dans le ventre, le mec dirait sans doute
« Ok, donc là, faut quand même aller
voir les collègues » mais il ne s’évanouirait pas, ne paniquerait pas non
plus. Mon mec n’est pas ma mère en somme. Du coup, lorsque je tombe malade et
que j’ai l’impression d’être au bout de ma vie, il compatit un peu pour être
gentil mais s’en fout clairement. Face à mes « Je te jure je suis teeeeeellement mal, là », j’obtiens plutôt
du « T’as rien. Prends un doliprane et
arrête de gémir s’il te plaît c’est vraiment relou. » Damn, j’avais
pourtant mis du Adjani dans ce « teeeeeellement ».
C’est
ainsi qu’à l’arrivée du printemps, j’ai trainé une sorte d’angine pendant près
de 3 semaines. Au programme : un mal de gorge d’une injustice totale parce
que cela faisait déjà 3 mois que j’avais arrêté de fumer et qu’auparavant je
n’avais jamais la gorge enflée, un rhume carabiné avec narines bouchées H24 assorties
d’une évidente impossibilité de dormir et, pour le fun j’imagine, un mal de
tête chronique qui a fait de la moindre petite contrariété un véritable sacerdoce.
Lému,
ma pote qui habite très loin et que je skype souvent a fini par constater que
je parlais du nez depuis plus de deux semaines. Elle m’a alors encouragée à aller
voir un « vrai médecin » parce que, je cite, « Meuf, il est manifeste que ton mec n’en est
pas un. » Stoïque, ce dernier a balayé d’un revers de main cet argument
en même temps que ma supplication pour un antibiotique. « Les antibiotiques, c’est pas
automatique ! ». Fils de pub. A force de dire ça, on n’en prend
plus jamais, c’est débile.
Alors
j’ai fait un truc que les médecins détestent, c’est-à-dire fi de son expertise pour
me rendre à la pharmacie. Là, j’ai trouvé un jeune homme, également en blouse
blanche, mais qui – enfin ! - comprenait mon désarroi. Sans doute aussi
qu’il avait remarqué les commissures de mes narines, irritées et rougies par
l’utilisation répétée de mouchoirs en papier (et de Sopalin après écoulement du
stock de mouchoirs), mes yeux fatigués et mon teint blafard. Bref, il a vu que la
bombe en moi dépérissait et a accepté de voler à son secours. Dix minutes plus
tard, j’étais ressortie de la pharmacie avec un sac plein de comprimés qui
devaient, le pharmacien me l’avait assuré, me tirer d’affaire. Sur une
insistance de sa part que je ne me suis pas vraiment expliqué, j’avais
également acheté du shampoing sec.
Remontant
quatre à quatre les marches de mon escalier, je suis entrée chez nous avec un
regard de défi et ai brandi le petit sac en plastique. A la vue dudit sac, le
médecin a soupiré : « Fais donc
voir si ça va t’être utile à quelque chose. » Et il a fait un truc
qui est juste hyper énervant : il a détaillé à haute voix les molécules
des différents médicaments. Donc déjà à ce moment-là, il me perd. Si ça se
trouve, il bluffe total en plus : « De la clamaxitanine ? Bas voyons, et pourquoi pas du
teroxefor ? ». Blablabla. J’ai cessé de l’écouter pour laisser mon cerveau fabriquer des images d’Homer Simpson dansant la
samba. J’ai repris conscience lorsque l’une de ses phrases m’a semblé plus
intelligible : « Ah mais quel
tocard, tu ne DOIS PAS mélanger ces deux molécules sans quoi ton foie peut… ».
Hop, il m’a reperdue. Je ne me rappelle donc plus de la suite exacte mais en
gros, cela donnait quelque chose comme « ton foie peut se mettre à dévorer tes intestins tandis que du sang va
soudainement jaillir de tes oreilles et que tu perdras la capacité à prononcer
les consonnes. » Ou autre chose dans le genre à la sauce Game of Thrones. Bref, un truc
flippant qui m’a donné moyennement envie de suivre les conseils du pharmacien.
Il
est têtu, mais moi aussi. Je suis donc passée à l’étape supérieure de mon
plan et me suis mise à devenir super relou. Mais alors vraiment super relou. J’ai
râlé, gémi, éternué, reniflé plus que de raison et là, alléluia lumière divine
et tutti quanti, cette odieuse technique a fini par porter ses fruits. Le mec
s’est levé, s’est rendu avec flegme jusque dans la salle de bain, a saisi sa
trousse de toilette dont il a sorti une petite boite blanche. De celle-ci il a
tiré une vingtaine de cachets qu’il a posés sur la table basse du salon devant
laquelle je me trouvais assise et m’a dit : « Tu prends un comprimé matin, midi et soir pendant une semaine. C’est
tout. » C’est tout ? Mais putain le truc était là et t’as rien
dit ? « Non parce que tu n’as
rien. ». Ah ouais ? Eternuement direct et sans main devant la
bouche vers son doux visage. J’ai pris les cachets comme il fallait pendant 3
jours, de façon aléatoire pendant 2 autres puis je les ai complètement oubliés
et les beaux jours ont fini par faire passer la maladie.
C’est marrant quand même parce qu’hier, alors que je nous servais des bières pour l’apéro, quand j’ai dit que je n’avais plus de pilule mais qu’après tout, oh on s’en moquait, je n’ai pas eu le temps d’aller plus loin que mon chéri me tendait le décapsuleur en même temps qu’une ordonnance.
C’est marrant quand même parce qu’hier, alors que je nous servais des bières pour l’apéro, quand j’ai dit que je n’avais plus de pilule mais qu’après tout, oh on s’en moquait, je n’ai pas eu le temps d’aller plus loin que mon chéri me tendait le décapsuleur en même temps qu’une ordonnance.
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PS : Merci pour vos messages qui m'encouragent à écrire plus régulièrement. Promis, je m'organise !
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